Avec Deathbringer, IsmaĂ«l Legrand signe un dĂ©but fracassant. Ce qui saute aux yeux immĂ©diatement, câest la maĂźtrise graphique : ombres pesantes, contrastes acĂ©rĂ©s, lumiĂšres quasi sacrĂ©es. Le noir et blanc devient un langage Ă part entiĂšre, une matiĂšre brute qui raconte autant que les mots.
Chaque planche semble sculptée plutÎt que dessinée. Legrand ne cherche pas à séduire : il cherche à frapper, à imprimer. Et il y parvient sans détour.

đ Une dark fantasy classique⊠mais habitĂ©e
Sur le plan narratif, Deathbringer coche clairement les cases du genre :
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un guerrier solitaire,
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une inquisitrice tourmentée,
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une entité millénaire affamée de mondes,
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un univers médiéval rongé par les forces occultes.
Rien de révolutionnaire dans le fond, mais une véritable sincérité dans la maniÚre de raconter : lente, méditative, presque liturgique.
On sent derriĂšre chaque scĂšne un auteur imprĂ©gnĂ© de mysticisme, dâiconographie religieuse, de folklore sombre. Le rĂ©cit transpire le dĂ©senchantement mĂ©diĂ©val autant que lâintrospection spirituelle.
Certains lecteurs trouveront lâensemble un peu attendu, mais la forme compense brillamment : composition virtuose, cadrages cinĂ©matographiques, grain du trait rappelant la gravure gothique.
Les influences sont lĂ â Berserk, Hellboy, certaines planches des maĂźtres expressionnistes â mais jamais dans la copie.
đ„ Deux destins liĂ©s par les tĂ©nĂšbres
Legrand étoffe ce monde à travers deux trajectoires qui vont inexorablement converger :
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le guerrier, arpenteur des terres souillées, silhouette hantée par les ombres ;
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lâinquisitrice, qui dĂ©couvre que son sang cache un hĂ©ritage paĂŻen oubliĂ©.
Leur lien, invisible au dĂ©part, se dĂ©voile dans la lutte contre un dĂ©voreur de mondes, Ă©chappĂ© dâune prison magique et bien dĂ©cidĂ© Ă corrompre tout ĂȘtre vivant.
Cette convergence crĂ©e une tension profonde, presque mythologique, renforcĂ©e par lâesthĂ©tique tranchante du noir et blanc.
𩞠Une Ćuvre sensorielle avant tout
Deathbringer nâest pas un comics de divertissement rapide. Câest une expĂ©rience : visuelle, symbolique, charnelle.
Chaque page respire la poussiÚre, la foi brisée, la violence sacrée.
Chaque ombre raconte une douleur, un secret, une menace.
IsmaĂ«l Legrand signe un premier album qui marquera durablement, mĂȘme sâil ne cherche Ă plaire ni par la facilitĂ© ni par la complaisance.
đŻ Verdict : puissant, mystique et dĂ©jĂ incontournable
Deathbringer est une entrée en matiÚre impressionnante : un univers noir, viscéral, une ambiance religieuse et désespérée, un trait qui frappe comme un coup de couteau.
Une Ćuvre qui divisera â mais câest le privilĂšge des comics qui comptent.
Le comics Deathbringer (Ăditions Delcourt), est disponible dĂšs maintenant dans toutes les bonnes librairies au prix de 25.50âŹ

