Au fil de nos vingt années d’expérience, nous nous sommes plongés dans la bibliographie de Jiro Taniguchi, explorant ses œuvres phares et nous penchant désormais vers des titres moins connus. Cette démarche s’aligne parfaitement avec notre désir croissant de découvrir davantage l’Histoire du Japon.
Avis manga – Kaze No Sho – Le Livre du vent
Dans cet ouvrage, les deux auteurs se penchent sur la figure historique de Yagyu Jubei, illustre escrimeur du XVIIe siècle, qui, avec sa famille et leurs alliés, a œuvré dans l’ombre pour la protection du régime. Cette narration, abondamment documentée, revisite l’un des grands conflits politiques de l’Histoire du Japon tout en mettant en avant l’action grâce à un personnage reconnu pour ses prouesses en ce domaine.
La découverte du Japon de cette époque sous cet angle a été une expérience fascinante pour nous. Sous le Shogunat des Tokugawa, tel qu’il est décrit dans le Pavillon des Hommes, bien que l’histoire soit totalement fictive, elle nous a permis d’appréhender les tensions politiques entre les deux entités clés de l’époque : le shogun et l’empereur. Cette exploration est passionnante, dévoilant les implications, les alliances, les positions, et les croyances en jeu.
Cela s’accompagne d’un personnage principal captivant, dont le charisme est habilement mis en avant par les auteurs. Yagyu Jubei figure parmi les grands noms du maniement du sabre au Japon, aux côtés de Musashi Miyamoto ou Kojiro Sasaki. Les auteurs explorent longuement sa philosophie de vie, son rôle au sein du shogunat, ainsi que son art. Nous le suivons dans sa quête de perfectionnement.
Cependant, notre seul regret réside dans le fait que, malgré les efforts évidents de Taniguchi pour susciter l’émotion lorsque le sabre est dégainé, cela nous a paru quelque peu fade. Après avoir exploré des œuvres comme Vagabond et L’Habitant de l’infini où l’art du sabre atteint des sommets, ici, le rendu semble moins intense et répétitif.
Heureusement, au cœur de cette narration, se déploie une aventure fictive, mais des plus captivantes. L’empereur, privé de tout pouvoir et cloîtré dans une prison dorée, prend la fuite et cherche à rallier d’autres nobles à sa cause. Parallèlement, l’un de ses partisans dérobe le texte sacré et secret des Yagyu, une armée secrète, mais redoutablement efficace, au service du shogunat pour surveiller l’empereur. Le fils du chef de cette faction est chargé de récupérer ces éléments, lançant ainsi une traversée mouvementée du Japon. Entre évasions, conflits armés, duels, le récit est des plus palpitants, entremêlant des échanges philosophiques et politiques tout aussi stimulants.
Quant à Taniguchi, il demeure fidèle à son style habituel. Les paysages sont magnifiques, les personnages revêtent des costumes d’époque authentiques, les cases s’enchaînent avec fluidité grâce à une narration impeccable. Les scènes de combat, bien qu’elles ne nous aient pas transcendé personnellement, demeurent d’une beauté saisissante, surtout lors des affrontements impliquant plusieurs combattants. Tout cela est remarquablement réalisé, conçu pour plaire, notamment à un public européen curieux du Japon, même s’il n’est pas nécessairement amateur de manga. Cette représentation confère une atmosphère incroyablement réaliste.
Jiro Taniguchi et Kan Furuyama nous offrent ainsi un manga historique solide, ancré dans un contexte politique fascinant, mettant en scène des individus qui incarnent avec brio l’esprit, la philosophie, mais également la rigueur et la complexité de cette époque.
C’est juste regrettable que Taniguchi ne parvienne pas à insuffler une réelle intensité lors des scènes d’action. Néanmoins, il s’agit d’un classique solide à découvrir.
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