Ki-oon est un éditeur reconnu pour sa fidélité envers ses auteurs. Ainsi, il n’est pas surprenant de voir le duo Carnby Kim (scénario) et Yougchan Hwang (dessins) collaborer pour la seconde fois après leur première réussite avec Batard en 2014. Il a fallu attendre trois ans pour voir cette collaboration se poursuivre avec Sweet Home, une série webtoon publiée dans la collection « Toon » de Ki-oon.
Un webtoon est un manhwa (bande dessinée coréenne) publié en ligne. Ki-oon a lancé cette collection en 2014 avec Batard et poursuit avec Sweet Home, toujours dans un format épais et aux dimensions plus grandes. C’est un pari risqué, mais l’éditeur a décidé de continuer à accorder sa confiance aux deux auteurs pour poursuivre cette collection prometteuse.
Alors que la première série de Kim et Hwang se concentrait sur un thriller sombre et poisseux, Sweet Home explore un univers différent, toujours sombre et angoissant, mais cette fois-ci, il s’agit d’un survival horror. La série, qui compte 12 tomes en Corée, a été adaptée en série disponible sur Netflix pour la saison 1, en attendant la saison 2 qui devrait arriver cette année.
Hyeon-Su est un adolescent solitaire qui passe la plupart de son temps enfermé dans sa chambre à naviguer sur les réseaux sociaux et à jouer en ligne. Il refuse de parler à ses parents et refuse également de les accompagner en vacances. Suite à un accident tragique qui coûte la vie à sa famille, il se retrouve seul et sans ressources. Il décide alors de déménager dans un petit appartement dans un immeuble mal entretenu pour économiser son argent.
Refusant de sortir de chez lui, il ne croise que brièvement quelques-uns de ses voisins, dont il se moque éperdument. Cependant, un jour, il est témoin d’un événement étrange : l’appartement de sa voisine est grand ouvert et il entend des bruits bizarres provenant de l’intérieur. Il croit apercevoir un bras inhumain et se réfugie chez lui jusqu’à ce que cette même voisine vienne sonner à sa porte prétendant avoir été cambriolée. Elle se comporte de manière étrange avant de disparaître.
Pendant ce temps, ses autres voisins tentent de sortir de l’immeuble qui a été verrouillé et voient apparaître devant celui-ci une créature étrange, qui bien qu’humanoïde, ne semble pas humaine. Hyeon-Su se retrouve alors plongé dans un cauchemar où il doit lutter pour sa survie alors que les créatures envahissent l’immeuble et que ses voisins deviennent de plus en plus violents. Il va devoir affronter ses peurs et sortir de sa coquille pour tenter de s’en sortir.
Autant l’illustration et le découpage des auteurs sont immédiatement reconnaissables, autant le thème abordé dans Sweet Home est surprenant. On aurait pu s’attendre à ce qu’ils continuent sur la voie des thrillers, mais ils prennent rapidement un virage fantastique qui apporte une dimension inattendue à l’histoire.
Le début de la série est assez sombre et glauque, avec un personnage principal insupportable qui vit sa vie à travers internet. On pourrait penser que les auteurs allaient explorer les thèmes de la solitude et de la déconnection avec la société, à la manière de Tsutsui. Cependant, un drame violent va rapidement bouleverser la vie de Hyeon-Su, qui se retrouve à vivre dans un immeuble miteux.
On reste dans le glauque, mais on ne sait pas encore où les auteurs veulent nous emmener. C’est alors que l’horreur s’invite à la porte de Hyeon-Su, et que commence un huis clos angoissant qui suscite notre curiosité. On pourrait penser à un classique de zombies, mais il s’avère que les monstres ne sont pas des morts-vivants, mais des humains qui ont muté, et chaque mutation est différente. Cela promet une galerie de monstres terrifiants.
Pour qu’un huis clos fonctionne, il est nécessaire de disposer de trois éléments: un lieu où tous les personnages sont rassemblés, une menace présente et une galerie de personnages distincts. Dans Sweet Home, l’immeuble où se déroule l’histoire remplit toutes ces conditions. Il est assez vaste pour cacher des surprises tout en protégeant les personnages de l’extérieur, la menace est présente mais indéfinie pour le moment, et les personnages sont distincts et intéressants.
Hyeon-Su, le personnage principal, est un adolescent perdu qui projette de mettre fin à ses jours, mais qui retrouve une volonté de vivre face aux monstres qui envahissent l’immeuble. Parmi les autres personnages, certains sortent déjà du lot, comme le « truand » qui passe tout le tome à clamer qu’il n’en est pas un, mais qui se révèle être un personnage solide et fiable.
Graphiquement, le trait de Yougchan Hwang est toujours aussi reconnaissable, et le découpage de l’action est adapté à un webtoon, c’est-à-dire qu’il peut être défilé sur une tablette, avec des cases carrées et simplistes. Ce qui rend la lecture assez rapide, mais avec un réel plaisir. On a donc des premiers tomes intrigants et étonnants qui suscitent pleinement notre curiosité et qu’on lit avec plaisir. Il est très prometteur, encore plus que Batard.
Les tome 1 à 4 de Sweet Home sont disponibles dès maintenant dans toutes les bonnes librairies au prix de 15€